Un brin d'histoire

C'est à l'aube du 20ème siècle que Sigmund Freud, neurologue, invente la psychanalyse : à la fois une science qui éclaire le fonctionnement de l'appareil psychique et une méthode psychothérapeutique qui rompt avec les pratiques alors courantes.

Freud découvre qu'il y a en nous un inconscient psychique qui pèse sur nous et nous détermine, jusqu'à nous rendre parfois malade, comme Anna O., une jeune fille dont les symptômes n'ont aucune base physiologique mais viennent comme recouvrir un trou de mémoire : des souvenirs sont refoulés dans l'inconscient et remplacés dans la conscience par les symptômes.

Je pense que la psychanalyse est inventée par et pour la névrose, l'hystérie en particulier. De façon très rapide on peut dire que Freud explore à rebours le psychisme, c'est-à-dire en partant de l'adulte, jusqu'au fameux complèxe d'Oedipe, que Freud situe aux alentours des 5 ans.

Freud meurt en 1939 à Londres, à l'âge de 83 ans, après avoir fuit l'Autriche annexée par l'Allemagne nazie. Son cabinet, tel qu'il était à Vienne, a été reconstitué à Maresfield Garden, où il ne vécut pourtant que quelques mois, et ne reçut jamais de patients. Mais l'école anglaise avait déjà pris la relève, avec la fille de Freud, Anna, et Mélanie Klein. Klein, formée par Karl Abraham et Sandor Ferenczi, travaille avec les enfants et invente de nouvelles méthodes thérapeutiques et un nouveau style. Vont alors arriver Frances Tustin, Wilfred Bion, Winnicott, Donald Meltzer. Alors que Freud était parti de l'adulte, eux partent de l'enfant, du petit enfant, du nourrisson, montrant toute la complexité de l'embriologie psychique, l'intrication du génétique et du milieu où nait le petit homme. Si Freud a travaillé avec la névrose, les anglo-saxons permettent de comprendre les psychoses et l'autisme, qui s'enracinent beaucoup plus tôt dans l'histoire du développement psychique.

Ça travaille dur aux Etats-Unis aussi - avec entre autres Harold Searles -, en France, avec Jacques Lacan, André Green, Gisela Pankow ou Jean Oury. Les Français, en bons cartésiens, raisonnent en terme de structures. Il y a trois structures psychiques : névrose, psychose et perversion. Les anglais, en bons empiristes (l'empirisme est un courant philosophique qui s'oppose au rationalisme, en posant que toutes nos connaissances dérivent plus ou moins directement de l'expérience) pensent le développement psychique en terme de stades ou de positions, entre lesquels se font des va-et-vient incessants. Une position n'est jamais totalement dépassée et peut ressurgir au grès des aléas de l'existence, sous la forme d'un symptôme ou d'un comportement, qui ne sera pas adapté à l'âge du sujet.

L'Histoire de la psychanalyse et de la psychothérapie est animée depuis le début par des querelles et des ruptures. Freud lui-même ne fut pas franchement un exemple de tolérance. Chaque école a pourtant apporté sa pierre à l'édifice de la psychanalyse, pierre angulaire, pierre de touche, pierre de discorde. Mais l'essentiel est de pouvoir construire et travailler, en trouvant les outils qui s'adaptent à notre main et à notre style. La clinique psychanalytique est sans doute l'une des plus vastes et des plus riches. Mais elle souffre du dogmatisme de certains et, je crois que pour continuer à oeuvrer pour une clinique psychanalytique, il faut au contraire un peu de souplesse et ne pas toujours brandir notre intransigeance comme si elle était une vertu.

 
Sigmund FREUD dans son cabinet Viennois


Maresfield Garden, la maison que FREUD habita quelques mois à Londres avant de mourir en 1939

 

Anna FREUD (1895-1982), que son père appelait son Antigone.

 

Frances TUSTIN, psychanalyste anglaise (1913-1990)

 

Margareth MALHER, psychiatre et psychanalyste américaine (1897-1985)

 

Donald Woods WINNICOTT, pédiatre et psychanalyste anglais (1896-1971)

 

Giséla PANKOW, neuropsychiatre et psychanalyste française d'origine allemande (1914-1998)

 

Harold SEARLES, psychanalyste américain (1918-2015)